Entre anthropomorphisme et anthropodéni
- Jeanne Petite
- 28 août
- 11 min de lecture
Dernière mise à jour : 21 nov.
Pour mieux comprendre la relation complexe entre l'humain et l'animal, nous allons explorer deux notions opposées : l'anthropomorphisme et l'anthropodéni.
L'anthropomorphisme, c'est la tendance à attribuer des caractéristiques, des émotions ou des comportements humains aux animaux ou à des objets inanimés. À l'inverse, l'anthropodéni est le fait de refuser de voir chez les animaux des traits que l'on considère comme exclusivement humains.
Nous allons explorer la relation complexe entre anthropomorphisme et anthropodéni pour comprendre comment ces deux tendances ont façonné notre perception du monde animal. Nous explorerons leurs origines, leurs effets, bénéfiques comme néfastes, et illustrerons le tout avec des exemples concrets pour argumenter cette opposition.
L'anthropomorphisme

Nous avons tous tendance à interpréter le comportement de nos animaux de compagnie à travers notre propre regard. Qui n'a jamais pensé que son chien "se sent coupable" après une bêtise ou que son chat "boude" après une absence ? C'est un réflexe tout à fait naturel, car nous, les humains, possédons une grande capacité d'empathie, cette faculté de nous mettre à la place de l'autre et de projeter sur lui nos propres sentiments.
Mais est-ce que nos amis à quatre pattes partagent réellement ces émotions humaines complexes ? Pour le savoir, il est essentiel de nous pencher d'abord sur l'histoire de l'anthropomorphisme et de ses véritables implications.
À travers l'histoire :
Remontons très loin dans le temps, car l'anthropomorphisme ne date pas d'hier.
Même si le philosophe grec Xénophane a été le premier à nommer ce phénomène, la pratique est bien plus ancienne ! On en trouve la trace dès la Préhistoire, avec la plus vieille statuette connue à ce jour : le Löwenmensch, une sculpture en ivoire datée de 32.000 ans, représentant un être mi-homme, mi-lion. Cette œuvre témoigne de la capacité de nos ancêtres à lier le règne humain et le règne animal, probablement dans un but spirituel ou chamanique.
Cette tendance s'est poursuivie à travers les âges et dans d'autres régions du monde. Dans les Balkans, les archéologues ont mis au jour des objets datant de 6.000 à 3.000 ans avant J.-C., déjà ornés de représentations de corps humains. Ces découvertes, notamment dans la culture de Vinca, montrent que les premières sociétés agricoles de cette région utilisaient déjà l'anthropomorphisme pour représenter leurs divinités ou des concepts spirituels.
Cette tendance se retrouve à chaque grande époque :
Dans l'Antiquité égyptienne, la religion est marquée par des divinités hybrides, comme Anubis à tête de chacal ou Horus à tête de faucon.
Au Moyen Âge, des écrits comme le Roman de Renart utilisent des animaux pour incarner des traits de la nature humaine et critiquer la société.
Au XVIIe siècle, La Fontaine utilise ses célèbres fables pour dénoncer les travers de son temps en mettant en scène des animaux.
Au XIXe siècle, l'approche change radicalement avec Charles Darwin et ses ouvrages L'Origine des espèces et L'Expression des émotions chez l'homme et les animaux. L'éthologie, l'étude du comportement animal, prend alors un nouveau tournant, ce qui mènera aux travaux des "pères fondateurs" de la discipline : Konrad Lorenz, Niko Tinbergen et Karl von Frisch.
Enfin, du siècle dernier à aujourd'hui, l'anthropomorphisme est partout ! On le retrouve dans les films de Disney, Pixar et Dreamworks, dans les dessins animés, dans les mangas ou encore dans la publicité.
Les effets négatifs de l'anthropomorphisme :
Il est fascinant de constater à quel point nous avons tendance à attribuer des sentiments et des intentions humaines à nos animaux. Ce phénomène, appelé anthropomorphisme, a des aspects moins positifs que l'on imagine.
Un manque de connaissances sur le comportemental animal
Nous interprétons souvent mal le comportement de nos compagnons à quatre pattes.
Le chien à "l'air coupable" mais s'il baisse la tête ou évite votre regard, ce n'est pas forcément un aveu de culpabilité. Cela peut être une anticipation. Le chien est extrêmement sensible à votre langage corporel, votre ton de voix et vos expressions faciales. S'il a déjà associé votre posture tendue et votre voix qui monte à une punition, il adoptera cette attitude pour l'éviter. Quand il agit ainsi à votre retour, c'est parce qu'il a associé votre arrivée à un possible conflit, et non à une bêtise qu'il aurait faite il y a plusieurs heures.
Le chat ne vous "boude" pas après votre retour de vacances. Il s'est simplement habitué à un autre rythme de vie sans vous. Il a besoin d'un peu de temps pour se recaler sur votre routine quotidienne.
Un manque de données scientifiques
Quand la science ne peut pas encore tout expliquer, nous comblons les lacunes par des interprétations humaines.
Par exemple, le paresseux a ce nom en référence au péché capital de la paresse, car il se déplace très lentement. Les premiers explorateurs ont projeté sur cet animal leur propre perception de son activité. Or, sa lenteur n'est pas un trait de caractère, mais une adaptation vitale. Son régime alimentaire, composé de feuilles très pauvres en nutriments, l'oblige à avoir un métabolisme extrêmement bas pour survivre et économiser son énergie.
La projection inconsciente de nos propres émotions
Nous interprétons souvent les actions des animaux à travers le prisme de nos propres émotions.
Un gémissement de chien n'est pas l'équivalent de pleurs humains. Ces vocalises sont souvent liées à un stress, une douleur, une frustration, ou simplement à une réponse physiologique. Les larmes, chez les animaux, servent principalement à hydrater et protéger l'œil, sans la connotation émotionnelle que nous leur donnons. Une étude récente (2022) a toutefois montré que les chiens pourraient produire des larmes en réponse à la joie de retrouver leur humain, ce qui nous montre que le sujet est plus complexe qu'il n'y paraît. Mais cela ne signifie pas pour autant qu'ils "pleurent de tristesse" comme nous.
Les effets bénéfiques de l'anthropomorphisme :
Les côtés positifs de l'anthropomorphisme sont nombreux et souvent sous-estimés. En nous projetant dans le monde animal, nous renforçons les liens, nous éduquons et nous abordons même des sujets de société complexes.
Un puissant outil éducatif et culturel
L'anthropomorphisme est un excellent moyen de captiver les gens, en particulier les enfants. Une étude de 2021 a montré que les enfants sont plus attentifs aux histoires mettant en scène des animaux. Cela permet de leur transmettre des informations sur la faune et la flore de manière ludique.
Par exemple, dans Le Roi Lion de Disney, malgré son caractère fantastique, nous apprenons des choses sur les lions, comme le fait qu'ils vivent dans la savane, sont carnivores et vivent en famille.
Dans Madagascar, on nous fait découvrir une multitude de lémuriens et leurs ennemis naturels, les fossas.
Ces œuvres, tout en faisant rêver, transmettent des connaissances culturelles et zoologiques.
Un miroir de nos sociétés
Les récits anthropomorphiques sont souvent utilisés pour aborder des thèmes de société délicats ou complexes.

Prenons Princesse Mononoke, ce film d'animation aborde la relation fragile et complexe entre l'Homme et la nature, la vanité de l'Homme et les conséquences de la déforestation et de l’industrialisation. Des problématiques qui résonnent toujours autant aujourd'hui, notamment avec la disparition progressive des orangs-outans.
Dans Élémentaire, les scénaristes utilisent des personnages anthropomorphes (le feu, l'eau, la terre, l'air) pour aborder des sujets comme les stéréotypes, la stigmatisation et le déracinement, ce qui permet de sensibiliser le public aux défis que rencontrent les migrants dans le monde.
Une communication simplifiée et une empathie accrue
Sur le plan personnel, l'anthropomorphisme facilite la relation avec nos animaux de compagnie. Penser que son animal est "triste" ou "jaloux" nous pousse à faire preuve d'empathie et à lui donner plus d'attention, ce qui renforce le lien affectif. Ces raccourcis, comme dire "mon chat est câlin" ou "mon chien est jaloux", nous permettent de communiquer plus facilement sur le comportement de nos animaux, sans avoir recours au jargon scientifique de l'éthologie.
Ce qu'il faut retenir sur l'anthropomorphisme :
L'anthropomorphisme est une pratique à double tranchant. D'un côté, elle peut déformer la réalité et fausser notre rapport aux animaux en leur attribuant des émotions et des pensées humaines.
De l'autre, elle nous permet de développer notre empathie, de mieux comprendre et de nous adapter à certaines situations.
Comme pour beaucoup de choses, tout est une question d'équilibre. Si un anthropomorphisme excessif, bien qu'animé de bonnes intentions, peut être néfaste à l'animal, il est essentiel de garder un sens critique. Dans les situations problématiques, l'aide d'un professionnel du comportement animal peut apporter un regard extérieur indispensable pour le bien-être de votre compagnon.
Cependant, l'excès inverse, appelé anthropodéni, peut être bien plus préjudiciable au bien-être d'un animal. Nous allons explorer cela maintenant.
L'anthropodéni
L'anthropodéni est le fait de nier la capacité des animaux à ressentir des émotions, de la douleur ou à posséder une conscience.
Il est important de rappeler qu'en France, ce n'est que depuis 2015 que les animaux sont officiellement reconnus comme des "êtres vivants doués de sensibilité".
À quelle croyance ou théorie cet anthropodéni est-il lié ?
Les origines :
Plusieurs facteurs historiques et philosophiques ont contribué à la montée de l'anthropodéni :

La hiérarchie d'Aristote : Le philosophe grec Aristote a jeté les bases d'une vision anthropocentrique, en plaçant l'Homme au sommet de la création. Selon lui, les animaux étaient des êtres sans raison, donc intrinsèquement inférieurs.
Le rationalisme de Descartes : Au XVIIe siècle, René Descartes a grandement popularisé le concept de l'animal-machine. Pour lui, les animaux n'étaient que de simples automates, dénués de conscience, de sentiments et de capacité à ressentir la douleur. Leurs cris n'étaient alors que des réflexes mécaniques, comme le grincement d'une horloge détraquée. Cette théorie a malheureusement légitimé et encouragé la pratique de l'expérimentation animale.
Le béhaviorisme : Ce courant psychologique a renforcé l'idée que seules les observations de comportements extérieurs étaient valables. Les émotions, les pensées et les sentiments des animaux étaient considérés comme des sujets tabous et non pertinents pour la science. Le concept de conditionnement opérant de B.F. Skinner est un exemple de cette approche, qui se concentre sur les stimuli et les réponses observables sans tenir compte de la vie intérieure de l'animal.
L'ignorance de la science moderne : Pendant longtemps, la science s'est concentrée sur la compréhension du fonctionnement physique des animaux, en ignorant leur dimension psychologique et émotionnelle. Il a fallu attendre le développement de l'éthologie cognitive pour que la conscience et les émotions animales deviennent des sujets d'étude légitimes.
Les terribles effets de l'anthropodéni :
Il est aujourd'hui impossible de trouver des avantages à l'anthropodéni. Ce phénomène a des conséquences profondément négatives sur le bien-être animal.
L'exploitation industrielle et la souffrance animale
Le concept de l'animal-machine a permis de considérer les animaux comme de simples unités de production ou des marchandises. Cette croyance a historiquement justifié l'industrialisation de l'élevage et de l'abattage, menant à une négation de la douleur et du stress. Les conditions de vie en élevage intensif (surpopulation, manque d'espace) et les pratiques d'abattage sont ainsi conçues sans égard pour la sensibilité animale, car l'on part du principe que leur souffrance n'est qu'un simple réflexe mécanique.
L'idée que les humains soient soumis au même sort que celui que nous réservons aux animaux est choquante, mais c'est précisément le cœur de l'intrigue du manga The Promised Neverland.
Le récit explore cette inversion des rôles en mettant en scène des enfants élevés comme du bétail pour une autre espèce. Cette métaphore percutante nous force à confronter l'arbitraire de notre rapport aux animaux et la cruauté de l'anthropodéni, qui nie la sensibilité d'un être vivant. Au-delà de cette réflexion, l'histoire aborde également des thèmes universels tels que la survie, la famille et la quête de liberté.
L'ignorance des besoins fondamentaux
Cette vision erronée a également permis la sur-exploitation de certaines espèces pour des travaux pénibles. Des animaux comme les chevaux ou les ânes de bât sont contraints de porter des charges excessives dans des conditions extrêmes, car leur fatigue et leur douleur sont ignorées.
Même au sein du foyer, l'anthropodéni nous pousse parfois à mal interpréter les comportements de nos animaux de compagnie. Un chien laissé seul n'est pas vu comme souffrant d'ennui ou de solitude, mais simplement comme un animal qui attend le retour de son "maître". De la même manière, on peut passer à côté d'un problème médical ou comportemental grave en considérant un animal qui boite ou se cache comme étant "théâtral" ou simplement "chochote".
Un obstacle majeur à l'empathie
En fin de compte, l'anthropodéni est un obstacle majeur à la sensibilisation à la cause animale. Il crée une distance émotionnelle et un manque d'empathie, empêchant de prendre pleinement conscience de la sensibilité et des besoins réels des animaux qui nous entourent.
La place de l'anthropodéni aujourd'hui :
L'anthropodéni a nettement reculé grâce à l'essor de l'éthologie. Ce changement a été initié notamment par les découvertes de Darwin. Puis des pionniers comme Jane Goodall, Dian Fossey et Frans de Waal, ainsi que les "pères fondateurs" de la discipline, ont permis de faire progresser notre compréhension du monde animal. C'est d'ailleurs le primatologue Frans de Waal qui a créé le terme "anthropodéni".
Aujourd'hui, les avancées scientifiques confirment que les animaux possèdent une vie émotionnelle complexe, des liens sociaux profonds et des capacités d'adaptation remarquables.
Certaines espèces comme les grands singes, les dauphins ou les éléphants ont même une conscience d'elles-mêmes. Cette capacité a été mise en lumière par le test du miroir, qui a prouvé que certains animaux sont capables de se reconnaître dans un miroir, et non de percevoir leur reflet comme un autre individu.
Quelques exemples d'intelligence émotionnelle chez les animaux :
Les récits sur l'intelligence émotionnelle des animaux sont très nombreux, et ils mettent souvent en lumière des comportements à la fois touchants et complexes.
Les éléphants sont connus pour leurs rituels de deuil. Lorsqu'un membre du troupeau meurt, les éléphants l'entourent, le touchent doucement de leur trompe et émettent des sons graves. Il arrive même qu'ils reviennent sur les lieux de la mort pendant des années, ce qui suggère une profonde tristesse.
Les chimpanzés font preuve d'empathie en consolant un membre du groupe blessé ou vaincu, le serrant dans leurs bras ou le toilettant. Ils sont aussi capables de coopérer pour atteindre un objectif commun et partagent leur nourriture, y compris avec des membres non apparentés.
Les corvidés (corbeaux, pies, etc.) ont une mémoire exceptionnelle. Ils se souviennent des visages humains qui les ont traités avec gentillesse ou brutalité, adaptant leur comportement en conséquence.
De nombreuses études ont également démontré que les animaux sont capables d'utiliser des outils, une compétence que l'on pensait jadis réservée à l'Homme. Par ailleurs, certains animaux transmettent des connaissances culturelles à la génération suivante, comme en témoignent les techniques de chasse sophistiquées des orques.
Ce qu'il faut retenir sur l'anthropodéni :
À la lumière de ces observations, comment peut-on encore prétendre que seuls les humains pensent, s'adaptent et ressentent des émotions ?
Si l'anthropomorphisme peut fausser notre perception, l'anthropodéni, en niant la sensibilité animale, a des conséquences bien plus dramatiques sur leur vie.
Conclusion
Au terme de cette exploration, il apparaît que notre rapport aux animaux se trouve à la croisée de deux tendances opposées. L'anthropomorphisme, bien que parfois trompeur, est aussi un miroir qui nous permet de questionner nos propres sociétés et de renforcer notre empathie envers nos compagnons. C'est un outil puissant qui, s'il est utilisé avec discernement, peut nous éduquer et nous rapprocher du monde animal.
À l'inverse, l'anthropodéni est une vision du monde sans nuance, qui, en niant la sensibilité animale, a engendré de profondes injustices et a historiquement justifié l'exploitation et la souffrance. Comme l'ont démontré les pionniers de l'éthologie, l'idée de l'animal-machine est aujourd'hui réfutée par la science qui ne cesse de révéler la complexité de leur intelligence émotionnelle et de leurs liens sociaux.
Le véritable défi est de trouver un équilibre. Il ne s'agit pas de voir l'animal comme une simple projection de l'humain, mais de reconnaître ses émotions et ses besoins pour ce qu'ils sont. En abandonnant l'anthropodéni et en faisant preuve d'un anthropomorphisme éclairé par la science, nous pouvons enfin prendre conscience de la richesse du monde animal et bâtir une relation plus juste et respectueuse.
Ce long article sur l'anthropomorphisme et l'anthropodéni touche à sa fin.
Merci à vous d'être resté(e) avec nous jusqu'au bout !
Si vous souhaitez approfondir les sujets que nous avons abordés, vous trouverez ci-dessous la bibliographie qui a servi de base à la rédaction de cet article :
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De Waal, F. (2016). Sommes-nous trop «bêtes» pour comprendre l'intelligence des animaux?. Éditions les Liens qui Libèrent
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Murata, K., Nagasawa, M., Onaka, T., Kanemaki, N., Nakamura, S., Tsubota, K., ... & Kikusui, T. (2022). Increase of tear volume in dogs after reunion with owners is mediated by oxytocin. Current Biology, 32(16), R869-R870.,
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Watson, J. B. (1913). Psychology as the behaviorist views it. Psychological Review, 20(2), 158–177.










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